Intervention de Nataanii Means à Paris, le 13 octobre 2018, au cours de la 38ème Journée Annuelle de Solidarité du CSIA-nitassinan. Enregistrement Pascal Grégis du CSIA.

 

Nataanii Means English
Paris, 13 octobre 2018
Traduction Christine Prat, CSIA
Also published in English on Censored News

 

Nataanii s’est d’abord présenté à la manière traditionnelle puis a expliqué:

“Bonjour à tous, c’étaient mes salutations, que je suis supposé offrir chaque fois que je parle. Je peux me présenter en trois langues différentes. Je suis de trois Nations différentes. Je suis Oglala Lakota, Dineh – Navajo – et Omaha.”

“Pour ceux qui me connaissent, je suis venu ici chaque fois, les trois ou quatre dernières années. Et chaque fois, il se trouve que je me bats contre quelque chose de différent. Beaucoup de choses ont changé, depuis deux ans. Il y a deux ans, nous nous battions à Standing Rock. Et cette année, et bien, c’est dur d’être Autochtone, parce qu’il faut continuer, nous ne faisons que combattre, quoiqu’il arrive. Et en ce moment – nous passons sur l’année 2017 – cette année, nous combattons un autre oléoduc dans le Minnesota, la Ligne 3 de la compagnie Enbridge.

L’une des raisons pour lesquelles j’y participe, c’est que beaucoup de nos parents Anishinabe étaient à mes côtés pendant les sept mois à Standing Rock, à travers les dures épreuves. Et parce qu’ils ont fait cela, je me sens obligé d’être là-bas avec eux.

Standing Rock a été une expérience très instructive, pas seulement pour moi-même. Nous en avons appris beaucoup sur les oléoducs, et sur les tactiques utilisées, non seulement par la police, mais par les firmes de sécurité privées et les états.

Notre but maintenant est d’être efficace. Être efficace en retardant les travaux assez longtemps pour que ça coûte de l’argent à l’entreprise jusqu’à ce qu’elle doive abandonner le projet. Et, pour moi, être efficace de cette manière est toujours dangereux, mais c’est la voie la plus sûre que nous pouvons suivre.

L’an dernier, ils ont terminé la construction d’un oléoduc dans le Wisconsin, et dans le Nord du Canada, jusqu’au centre du Canada. Il y avait un groupe de gens qui s’appelaient le Camp Makwa, qui ont essayé de retarder les travaux jusqu’à l’hiver, dans le Wisconsin, pour repousser un peu l’oléoduc.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que nous vivons dans la plus grande superpuissance du monde. Le pouvoir militaire des Etats-Unis est présent partout dans le monde, et il était clairement présent à Standing Rock, où il a montré ce qu’il en avait à faire des populations d’origine de ce pays.

Ainsi, l’état du Minnesota avait un an pour approuver ou repousser cet oléoduc, par l’intermédiaire du comité de la PUC [Public Utilities Commission – Commission des Services Publics]. Ils l’ont approuvé par 5 voix à 0, ignorant totalement l’indignation du public. Nous avons fait sentir notre présence à ces gens qui approuvent ces oléoducs qui affectent directement les Autochtones vivant le long de leurs corridors. Ils ne nous ont pas regardés en face. Nous avons fait remettre la réunion, nous l’avons suffisamment perturbée, nous avons réussi à faire parler de nous dans le New York Time, le Los Angeles Times, et partout.

Vous savez, ces discours qui viennent d’être prononcés sur la décolonisation, tout ce qu’ils ont dit était vrai. Le subir en pratique est encore plus dur, le vivre est encore plus dur. En combattant des oléoducs, nous parlons de décoloniser un monde né drogué. Nous sommes accros au pétrole. Et nous ne pouvons pas être en manque. Si vous avez jamais vu un drogué en manque, c’est horrible. Et c’est ce que nous sommes, drogués, accros. C’est ce qu’est la race humaine actuellement, c’est une maladie, une addiction, c’est un virus. C’est ce que nous sommes maintenant.

Je veux dire, la Terre existe depuis environs 3 milliards d’années, et nous, depuis combien d’années sommes-nous là? 20 000 ans? Nous ne sommes pas vitaux pour cette Terre, nous ne sommes rien. Vous le savez, vous, puisque vous êtes ici. Mais ça accroît l’urgence de trouver de l’énergie renouvelable, de nouvelles solutions.

Aller à ces réunions, voir la tête de ces haut placés, les regarder en face, pour leur montrer qu’ils ne sont pas intouchables, est important. Parce que, si je peux choisir de rentrer chez moi, je n’ai pas d’endroit agréable où retourner. Je retourne là où les gens sont drogués, là où des gosses se suicident à l’âge de dix ans, là où mes cousins vendent de la méth. Je retourne là où les mines d’uranium et de charbon, là où les forages pétroliers et la fracturation nous donnent des cancers, maintenant. C’est notre réalité. Et il n’y a pas de vacances, pas de jours de congé, si vous êtes une personne autochtone, un Indien.

Alors, c’est ça le mobile pour être efficace contre la Ligne 3: parce que je suis fatigué du cancer, je suis fatigué des drogues qui nous arrivent, je suis fatigué de ce trafic sexuel de femmes Autochtones dans les camps masculins. Et tout cela… Surtout ces femmes Autochtones disparues ou assassinées, c’est un problème énorme, avec ces camps masculins qui s’installent. Ils font du trafic sexuel de nos femmes à cause de l’environnement raciste qui se développe. Ces projets d’extraction sont construits juste à côté des Réserves Indiennes. Et qu’y a-t-il aux alentours? Seulement nous.

Cet oléoduc est en train d’être construit à travers les champs de riz sauvage des Anishinabe, là où ils récoltent leur nourriture en été, et où ils ont découvert récemment un village vieux de 7000 ans, un village Dakota.

Après que le DAPL ait été construit, ils ont approuvé la Ligne 3, ils ont approuvé les gazoducs de LNG, le Canada a approuvé l’oléoduc Trans Mountain de Kinder Morgan, et le Keystone XL.

– Et Bayou Bridge!

– Bayou Bridge est en fait un prolongement du DAPL, et ils sont encore en train de le combattre.

Et le pétrole vient des sables bitumineux, et ces sables bitumineux sont le pétrole le plus mauvais, le plus empoisonné, le plus affreux qu’il existe. Le pétrole de Bakken est très mauvais, mais les sables bitumineux sont pires. Et ils essaient d’accroître les sites de sables bitumineux d’un quart, voire même deux quarts leur taille, maintenant.

Alors, je ne sais pas de quoi je parlerai si je reviens l’an prochain. J’espère que ce sera pour dire que nous avons battu la Ligne 3 et le Bayou Bridge!

Vous savez, même dans nos terres ancestrales, où se trouve le Monument National de Bears Ears [en Utah], ils essaient de l’ouvrir à l’exploration, au forage pétrolier et à la fracturation. Ils pratiquent aussi la fracturation en Pays Navajo, à un rythme effréné. C’est écrasant, parce que nous sommes sur les lignes de front, que ça nous plaise ou non, que nous le choisissions ou pas, nous sommes forcés d’être sur les lignes de front.

Les gens oublient qu’il y a plus de 560 Nations Autochtones, rien qu’aux Etats-Unis. En tant qu’Autochtones, nous constituons 0,8% de la population des Etats-Unis. Et nous sommes ceux qui combattons ces horreurs! Alors, c’est là que VOUS entrez en jeu! Venez vous faire arrêter maintenant! Nous encourageons nos alliés à la couleur de peau privilégiée dans le système, de faire ce qu’ils peuvent pour faire bouger les choses, pour faire du bruit et semer la perturbation, en tant qu’alliés des Autochtones.

Et je vous remercie tous d’être ici, d’écouter, de rester dans cette pièce trop chaude. Donc, quand nous repartirons d’Europe, nous devrons retourner à tout ça. Ça peut sembler bizarre quand je le dis, mais ce n’est pas drôle de rentrer chez nous. Nous allons continuer à combattre, à faire de notre mieux, et continuer indéfiniment à le faire.”

 

 

 

 

Nataanii Means,
Paris, October 13, 2018 Français
Also published in English on Censored News

Speech by Nataanii Means in Paris, October 13, 2018, at the 38th Annual Day of Solidarity of the CSIA-nitassinan.
Recorded by Pascal Gregis and Christine Prat from CSIA, transcribed by Christine Prat

 

Nataanii presented himself in the traditional way and further explained:

“Hello everyone, this is my greeting, that I am supposed to give whenever I speak. I can present myself in three different languages. I am from three different Nations. I am Oglala Lakota, Dineh – Navajo – and Omaha. For those who know me, I have been coming for the past three or four years. And each time, it seems that I am fighting something different. A lot has changed since two years ago. Two years ago, we were fighting in Standing Rock. This year, now, it’s hard to be indigenous, because you have to keep going, you just keep fighting, no matter what. And right now – we have to go through last year, 2017 – and this year we are fighting another pipeline in Minnesota, called Line 3, of Enbridge Corporation.

One of the reasons I am here is because a lot of our Anishinabe relatives stood with me through the seven months at Standing Rock, through the hardships. Because they did that, I feel an obligation to be there with them.

Standing Rock was a great learning experience, not only for myself. Learning about pipelines in themselves, and the tactics used by not only police, but private security firms, and by the states.

Our goal now is to be effective. To be effective to actually delay enough to cost the corporation enough money until the drop the project. And, to me, being effective in that manner is still dangerous, but it is the safest road we can go.

Last year, they finished the pipeline building in Wisconsin and in Northern Canada, down to Middle Canada. There was a group of people called the Makwa Camp, who tried to delay it enough in the winter time, in Wisconsin, to push the pipeline back further.

What you want to understand is that we live in the biggest superpower in the world. The military might of the United States is present all over the world, and it was definitely present at Standing Rock, it showed how they cared about the original people of this land.

So, the state of Minnesota had a year to approve or deny this pipeline, through the PUC committee. They approved it, 5 to 0, totally ignoring the public outcry. So, we went to another meeting where they were voicing what they call environmental safety measures, to the public. We made our presence known to these people who approved these pipelines that directly affect Indigenous people living along their row. They wouldn’t look at us in our eyes. We postponed the meeting, we disrupted it enough, made it to the New York Time, the L.A. Times, all over.

You know, on the talks about decolonization, everything they said was right. To practice it is even harder, to live it is even harder. When we are fighting pipelines, we are talking about decolonizing a world that was born into an addiction. We are addicted to oil. We can’t go cold turkey. If you have ever seen an addict go cold turkey, it’s horrible and that’s what we are, addicted. That’s what the human race is right now, it’s a disease, it’s an addiction, it’s a virus. That’s what we are right now.

I mean, the Earth has been around for 2 billion years, we have been around for what? 20 thousand? We are not vital to this Earth, we are nothing. I mean, you know you guys, because it is why you are here. But it pushes the urge of finding renewable energy, new solutions.

Going to these meetings and to these higher ups and their faces, getting in their faces, showing them that they are not untouchable is important. Because, if I can choose to go home, I don’t have a nice place to go home to. I go back where people are addicted to drugs, where kids are committing suicide at the age of ten, where my cousins are selling meth. I go back to where uranium, coal mining, where oil drilling, where fracking is giving us cancers, right now. That’s our reality. And there is no vacation, there is no holiday, when you are an original person, an Indian.

So, about this Line 3, to be effective is the motive, because I am tired of cancer, I am tired of drugs coming in, I am tired of my women being sex-trafficked into men camps. And all those things… Specially those missing and murdered Indigenous women, it is a huge factor in those men camps that come in. They sex-traffic our women because of the environment of racism that’s happening. These extraction projects are built right next to Indian Reservations. And, what else is around? Just us.

This pipeline is built right through Anishinabe wild rice fields, where they go to collect their food in the summer time, where they recently found a 7000 years old village, a Dakota village.

After DAPL was built, they approved Line 3, they approved LNG gas lines, Canada approved Kinder Morgan Trans Mountain pipeline, and the Keystone XL.”

– “And Bayou Bridge!”

– “Bayou Bridge, well, it’s a continuation of DAPL and they are fighting that still.

The oil comes from the tarsands, and these tarsands are the most cruel, poisoning, ugliest oil that is. The Bakken oil is bad, the tarsands are worse. And they are trying to increase the tarsands by one quarter of its size, two quarters of its size by now.

So, I don’t know what I’ll be talking about when I come back next year. Hopefully will it be that we beat Line 3 and Bayou Bridge.

You know, even in my homelands where Bears Ears National Monument is [in Utah], they are trying to open it for exploration for oil drilling and fracking. There is also fracking in Navajo Country, at high rate. It’s really overwhelming, because we are on the frontlines, whether we like it or not, choose it to be or not, we have to be on the frontlines.

People forget that there are over 560 Nations in the United States alone. We make up for 0.8% of the population of the United States, as Indigenous people. We are the ones fighting those atrocities. So, that’s where YOU come in! Come get arrested now! We encourage our allies, the people with privileged skin in the system, to do what they can to move what they can move, to create noise and to create disruption, as an ally to Indigenous people.

And I thank all of you for being here, for listening, for being in this hot room. So, after we leave here, we shall have to go back to all that. It might sound funny when I say, but it’s not funny when we go back home. We’re going to keep fighting, doing the best we can, and just going to keep doing it.”

 

 

 

 

Christine Prat, CSIA, français
Octobre 20, 2018
Also published on Censored News

 

Two Water Protectors, who have been fighting and suffering a lot in Standing Rock, Nataanii Means and Tufawon, are now back to Europe for a “Resilience Tour”. In Paris, they took part in several events, to celebrate AIM’s 50th Anniversary, and CSIA’s 40th Anniversary.

On October 12th, in the afternoon, a gathering took place to honor the AIM and pay a tribute to the leaders who have passed to the Spirit World, and, in the evening, Raye Zaragoza (Akimel O’odham/Xicana), Nataanii Means and Tufawon had a show.

The evening started with beautiful songs by Raye Zaragoza.

 

Then, Nataanii and Tufawon started with their hip-hop show. Nataanii presented himself and delivered a speech about the AIM leaders who left us, explained how complicated it was without the Elders, and said that their struggle to protect water is still going, now against the pipeline Line 3 of Enbridge.

Nataanii Means presented himself, saying that he came from three different Nations: Oglala Lakota, Omaha and Dineh (Dineh being often known as Navajos).

Then he talked about the AIM:

“My father fought for a long time, alongside my auntie and my uncle here, Jimbo and Jean. They all worked together for a long time. Jimbo talked about how our past leaders are past away now, no matter whoever they grouped with. Jean said it too. Everyone they grouped with in the movement, they are gone now.

I am a product of what they built. One day, I shall be an ancestor to one of my people. So are you. That’s why we have to start thinking collectively as conscious people.

We are fighting another pipeline, in Minnesota. It’s called Line 3, and you can look it up on the Internet, at www.stopline3.org. On Facebook, look up Ginew Collective, g, i, n, e, w. Look that up.

But a few weeks ago, me and Tufawon, we just came from that camp. We’re fighting that billionaire company, and I was sitting there, in a meeting, and I looked around, because a question came up. It was a really hard question, and I expected somebody else to answer it. I expected one of my Elders to be there to answer it. But they were not there, there was nobody there. There was us. And that was a new feeling for me, to be there without these people. But that’s how life is, you understand that.

You know, it’s hard for me and Rafa [Tufawon] to both be here. You know that, leave those guys behind to do a lot of work.

So, the least we can do for them is to ask you to go home and look up stopline3.org and Ginew Collective, and share with your circle, donate and spread the word.”

Then, Nataanii and Tufawon went back to playing music.

 

 

 

Excerpt from the info page of stopline3, there is much more info on this site – among others, several video interviews of Winona La Duke – thus look it up:

The existing Line 3 is an Enbridge pipeline that ships crude oil from Alberta to Superior, Wisconsin. It spans northern Minnesota, crossing the Leech Lake and Fond du Lac reservations and the l855, 1854, and l842 treaty areas.  And it is a ticking time bomb. It was built with defective steel in l96l, has had numerous ruptures and spills, and is running at half pressure because of severe corrosion.  Instead of cleaning up this liability, Enbridge wants to simply leave it in the ground forever, and cut a brand new energy corridor through our best lakes, wetlands, and wild rice beds, and the heart of Ojibwe treaty territory.  They first proposed this new route for the Sandpiper pipeline in 2013, but years of fierce resistance in Minnesota drove them to cancel that project and buy a share of the Dakota Access pipeline instead. At $7.5 billion, the proposed new Line 3 would be the largest project in Enbridge’s history and one of the largest crude oil pipelines in the continent, carrying up to 915,000 barrels per day of one of the dirtiest fuels on earth, tar sands crude. They call it a “replacement” but it is larger, with higher volume, in a new corridor.  First Nations, tribal governments, landowners, environmental groups, and communities across the Great Lakes have been fighting for 5 years now to stop this new corridor and #StopLine3.  We are here to protect the water and our future generations.

 

 

TOURNEE ‘RESILIENCE’ DE DEUX PROTECTEURS DE L’EAU: LA LUTTE CONTRE LES OLEODUCS CONTINUE

Christine Prat, CSIA English
20 octobre 2018
Egalement publié en anglais sur Censored News

Deux Protecteurs de l’Eau, qui ont combattu et beaucoup souffert à Standing Rock, Nataanii Means et Tufawon, sont de retour en Europe pour une tournée intitulée “Résilience”. A Paris, ils ont pris part à diverses manifestations, pour célébrer le 50ème Anniversaire de l’AIM et le 40ème Anniversaire du CSIA-nitassinan.

Le 12 octobre, l’après-midi, il y avait eu une réunion pour commémorer l’AIM et rendre hommage à ses dirigeants maintenant passés dans l’Autre Monde, et le soir, Raye Zaragoza (Akimel O’odham/Xicana), Nataanii Means et Tufawon ont donné un concert.

La soirée a commencé avec les chants mélodieux – et engagés – de Raye Zaragoza.

 

Puis, Nataanii et Tufawon ont entamé leur concert hip-hop. Nataanii s’est présenté et a parlé des dirigeants de l’AIM qui nous ont quitté, et expliqué que c’était très difficile de continuer sans les Anciens. Il a expliqué aussi que leur lutte pour protéger l’eau continue, actuellement contre l’oléoduc Line 3, de la firme Enbridge.

Nataanii s’est présenté, à la manière traditionnelle. Il dit qu’il était issu de trois Nations différentes: Oglala Lakota, Omaha et Diné (‘Diné’ étant souvent connus sous le nom de ‘Navajos’).

Puis il a parlé de l’AIM:

“Mon père s’est battu pendant des années, avec à ses côtés ma tante et mon oncle ici présents, Jimbo et Jean. Ils ont travaillé ensemble très longtemps. Jimbo a parlé tout à l’heure de nos dirigeants qui nous ont quitté, à présent, peu importe à quel groupe ils appartenaient. Jean l’a dit aussi. Tous ceux avec qui ils se sont groupés, dans le mouvement, nous ont quitté maintenant.

Je suis le produit de ce qu’ils ont construit. Un jour, je serai un ancêtre pour quelqu’un de mon peuple. Vous aussi. C’est pourquoi nous devons nous mettre à réfléchir collectivement, en tant que gens conscients.

Nous combattons un autre oléoduc, dans le Minnesota. Ça s’appelle Ligne 3. Vous pouvez chercher les infos sur l’Internet, sur le site stopline3.org. Sur Facebook, cherchez Ginew Collective, g, i, n, e, w. Allez y voir.

Mais il y a quelques semaines, moi et Tufawon, revenions tout juste de ce camp. Nous combattions cette compagnie qui vaut des milliards, et j’étais là, dans une réunion, et j’ai regardé autour de moi, parce qu’une question avait été posée. C’était une question très difficile, et je m’attendais à ce que quelqu’un d’autre réponde. Je m’attendais à ce que l’un de nos Anciens soit là pour répondre. Mais ils n’étaient pas là, personne n’était là. Seulement nous. Et ce fut un sentiment nouveau pour moi, d’être là sans ces gens. Mais c’est la vie, vous le savez bien.

Vous savez, c’est dur pour moi et Rafa [Tufawon] d’être ici, tous les deux. Vous savez ce que c’est, on laisse les gars derrière pour faire un travail énorme.

Donc, le minimum que nous puissions faire pour eux, c’est de vous demander, en rentrant chez vous, d’aller sur le site stopline3.org et Ginew Collective, et de partager avec votre entourage et vos connaissances, de faire des dons et de transmettre l’info.”

Puis, Nataanii et Tufawon sont retournés à la musique:

 

 

 

Extrait de la page d’information du site stopline3. Il y a beaucoup plus d’informations sur ce site – entre autres des vidéos d’interviews de Winona La Duke – donc allez y voir:

La Ligne 3 existante est un oléoduc de la firme Enbridge qui transporte du brut d’Alberta jusqu’au lac Superior, dans le Wisconsin. Il part du nord du Minnesota, et traverse le Lac Leech et les Réserves de Fond du Lac et les régions des traités de 1855, 1854 et 1842. C’est une bombe à retardement. Il a été construit en 1961 avec de l’acier défectueux, il y a eu de nombreuses fissures et marées noires, et il ne fonctionne qu’à la moitié de la pression, à cause de l’extrême corrosion. Au lieu de nettoyer cet oléoduc qui pose tant de problèmes et d’incertitudes, Enbridge veut tout simplement le laisser dans le sol pour toujours, et ouvrir un nouveau corridor à travers nos plus beaux lacs, zones humides et champs de riz sauvage, et à travers le cœur du territoire Ojibwe selon les traités. Ils ont d’abord proposé ce nouveau tracé pour l’oléoduc Sandpiper en 2013, mais des années de résistance féroce dans le Minnesota, les a forcés à renoncer au projet et à acheter des parts du Dakota Access Pipeline à la place. Au prix de 7,5 milliards de dollars, le nouveau projet de Ligne 3 serait le plus grand de l’histoire d’Enbridge, et l’un des plus grands oléoducs pour le brut du continent, transportant jusqu’à 915 000 barils par jour du carburant le plus sale sur terre: le brut de sables bitumineux. Ils intitulent cela un “remplacement”, mais c’est plus grand, avec un plus grand volume, dans un nouveau corridor. Les Premières Nations, les gouvernements tribaux, les propriétaires terriens, les groupes écologistes et les communautés dans la région des Grands Lacs, combattent depuis 5 ans pour bloquer ce nouveau corridor et la Ligne 3, #StopLine3. Nous sommes là pour protéger l’eau et les générations futures.

 

CSIA-NITASSINAN: JOURNEE DE SOLIDARITE DU 13 OCTOBRE 2018

Cette Journée a aussi célébré le 40e annivesaire du CSIA et le 50e anniversaire de l’AIM

 

 

La Journée a débuté par une danse offerte par un groupe de jeunes Kanaks aux invités Amérindiens:

 

 

Autres photos

 

LES PARTICIPANTS

 

Jean Roach, Lakota

Voir le texte de son intervention

 

Nataanii Means, Diné (Navajo), Lakota, Omaha

Voir le texte de son intervention

 

Jimbo Simmons, Choctaw, de l’AIM

Voir le texte de son intervention

 

Yvannick Waikata, Kanaky

Voir le texte de son intervention

 

Félix Tiouka, Guyane “Française”

 

Vanessa Joseph, Ka’lina, Guyane “Française”,

 

Nicole Chanel, Teko, Guyane “Française”

 

Cindy Van der Pijl, Arawak/Lokono, Guyane “Française”

Voir le texte des trois interventions

 

Moëtai Brotherson, député, Tahiti

 

Mauro Millan, Mapuche, Argentine,

 

Natividad LLanquileo, Avocate Mapuche, Chili

 

 

 

Nataanii Means was one of the speakers during the 37th Annual Day of Solidarity with Indians of the Americas organized by the CSIA-nitassinan on October 14th 2017. He talked about his experience in Standing Rock, during the struggle against the DAPL and commented on the documentary “Rise”, by Michelle Latimer, produced by Viceland.

After having presented himself, as Lakota, Omaha and Dineh, and thanked the people in the audience for having taken time from their Saturday in order to be there, Nataanii talked about what he had been going through last year.

Christine Prat

 

Nataanii Means in Paris, en français
37th Day of Solidarity with American Indians
organized by CSIA-nitassinan
Recording and transcript Christine Prat
October 14th, 2017
Also published on Censored News

 

“For the past two years, the CSIA has brought me out to perform, to speak, and last year I was living at the camps, I was living in a Teepee with my friend Tyler, in the Camp Red Warrior. I took time to fly over here and then I went back. The tension had grown a lot and I ended up being arrested, on November 27th. It was the day we called ‘The Treaty Camp Raid’. I think our initial charges were a felony charge and three misdemeanor charges.

Just watching that film brought back a lot of memories, a lot of good memories, a lot of bad memories, a lot of regret, a lot of pain, and a lot of anger. You know, a lot of us, we gave up a lot to go out there and our whole lives changed after that. The film was very beautiful, the pictures are very beautiful, of my people, and I don’t want you to keep that in your head as how we are all the time. Because we come from very hard circumstances. Our biggest fight, our whole fight, was with each other. I have to tell you straight away, because we fought each other hard. And it was really a struggle to even go on, like to physically stop the pipeline, we were fighting eternally just to do that. Because a lot of people in the camps did not respect the diversity of tactics.

A lot of people gained a lot of things from this fight, you know, as far as Eagle boots, as far as money… For me, I gained a lot of regret. I was just talking to Tara [Houska], right there, we were watching the end of that video… Fuck that, man! It ends so badly! And all those veterans coming, it did not help anything. From the beginning of the camps – you have to understand – our people have been oppressed for so long, that we have just not gained the knowledge and the just understanding of what matriarchy is. But ideas of patriarchy are so implemented into older people, they have suffered through the system, it has just been in them, for generations. It was really hard to work in that camp because of those ideas of patriarchy, they kind of reign supreme, even though we were trying to stay true to ourselves. Myself and a few of my friends, we stayed through the winter, after we were ended, we stayed three months after that. And that’s when we’ve really seen the corruption of Standing Rock Sioux Tribe [council], of IRA [Indian Reorganization Act] governments. We’ve seen how those veterans showed up, ended up infiltrating into certain groups and dividing the people. Later on, we found out that those infiltrating groups were bringing drugs in. And the winter was really hard, one of the hardest we’d been through, we got four blizzards. And that’s when I learned how to be, it was one of the hardest times of my life. It was how I learned to be a human being, I think. Because we had to care for each other, we had to watch out for each other. It was not about any kind of groups in the camp, it was about who is living there. And it was about not freezing to death. And that kind of detoured us from thinking about the pipeline. During that time, the work was presumably halted. But they were drilling underneath the river the whole time they were not supposed to be working. We did not have the numbers, we did not have the support, and we did not have the energy to even carry out any kind of action to stop the drilling.

I tell you the story because I thought it would help, but I don’t want to keep these guys [other speakers] waiting because I tell a long story. I tell you the story on this one:

There is one point in February when with Witko and Tufawon, we got back from a trip [to call banks to disinvestment], and our friends Yazz and Sage, and a few other people said “we have an idea”. They had this paper, it was divided in three sections and one said ‘weeks’, the other said ‘months’ and the other said ‘years’. I said ‘what is this?’ And they told me ‘if you had to do time, how much do you wanna do, to stop this pipeline?’ I just looked at it and I thought ‘no time’. We were suffering of severe paranoia, and we were tired all the time, and it was cold, and there are a lot of things that are not seen on camera: we fought the cops many times on the bridge, the National Guard… and by that time we got arrested most of the time, so I looked at that paper and I said ‘years’. And that’s not to brag, that’s not to be seen as this much of a warrior, I don’t think of myself as a warrior. I mean, I would have preferred it to be weeks, but I looked at it, ‘if I want to do this, it is when I want to sacrifice’. And it was only me and Sage that picked years. And each category had a role to play in our plan. Anyway, they had a women gathering a couple of days after that, a few of my aunts came to share wisdom with those young women and they got some power in camps, it was really good to see. When I say ‘my aunts’, it’s Madonna Thunderhawk and Marbella Philips. They were part of that women’s camp. We went to them with the plans to ask their advice, because those women were at Wounded Knee in 1973 and since that time, they’ve done so much work for the movement. So, I asked them what they thought. And they told me ‘you’re too young, we don’t need you in prison yet. There are already enough of us in prison’. And it confused me. I did not know how to feel about that. And they really did not want us to do it. So, we listened to them. For we value them, we value their opinions, their wisdom. So, we did not go through with the plan, we went through with another one, which did not even work. The cops had finally found out about it. That’s the end of February, that’s when they closed the camps. And they had done drilling in March. But ever since that decision, every day I think about that.

What remain is torment and regret. I don’t think we won. I think we lost, we lost our fight. And I know about losing fights!

I don’t know what the answer is, I don’t want to pretend to know what the answers are. I know what I have to do as an indigenous young man. I am honored to be up here, with these people, I am honored to be here with you and I am honored to represent my Nation, and I just came to the realization a while ago, that we’re gonna have to fight every single day in our life and that’s something I don’t expect you to understand, I don’t think you will understand it, but that’s what we do, that’s who we are. And I think that balances my torment, because I am so proud to be this person I am, so proud to have my ancestors running through my veins. So, I am going to honor them the best way I can, every single day of my life. And I’ll continue to fight, whether that be through music, through art, through court systems, through frontline work, for community development or with the youth.”

 

 

In English

Nataanii Means était l’un des intervenants, lors de la 37ème Journée de Solidarité avec les Indiens des Amériques organisée par le CSIA-nitassinan. Il a parlé de son expérience à Standing Rock, lors de la lutte contre l’oléoduc DAPL, de ses regrets et de ses espoirs, et commenté le documentaire de Michelle Latimer “Rise”, sur Standing Rock.

Après s’être présenté, comme Lakota, Omaha et Diné, il a remercié les personnes présentes d’avoir pris du temps sur leur samedi pour être là, Nataanii a raconté ce qu’il avait vécu, l’an dernier, à Standing Rock.

J’ai transcrit et traduit l’essentiel de ce qu’il a dit.

Christine Prat

 

“Ces deux dernières années, le CSIA m’a invité ici pour chanter et pour parler. L’an dernier, je vivais dans les camps, je vivais dans un Tipi avec un ami, dans le camp Red Warrior. J’ai pris le temps de venir ici en avion, puis je suis retourné là-bas. La tension avait beaucoup monté, et j’ai finalement été arrêté, le 27 novembre 2016. C’était le jour que nous avons baptisé ‘Le Raid du Camp du Traité’. Je crois que les accusations initiales portées contre nous constituaient un délit et trois infractions.

“Le film que nous venons de voir a fait remonter beaucoup de souvenirs, beaucoup de bons souvenirs, beaucoup de mauvais souvenirs, beaucoup de regrets, beaucoup de souffrance, et beaucoup de colère. Vous savez, la plupart d’entre nous ont renoncé a beaucoup de choses pour aller là-bas, et nos vies ont été complètement changées, après ça. Le film est très beau, les images sont très belles, ces images de mon peuple, mais je ne voudrais pas que vous gardiez cela dans vos esprits comme étant ce que nous sommes tout le temps. Parce que nous avons traversé des circonstances très dures. Notre plus grand combat, l’essentiel de notre combat, était entre nous. Je dois vous le dire tout net, nous nous sommes combattus les uns les autres très durement. Et c’était une véritable lutte pour, ne serait-ce que continuer, à bloquer l’oléoduc physiquement, nous nous battions éternellement rien que pour faire cela. Parce que beaucoup de gens dans les camps ne respectaient pas la diversité des tactiques.

Un grand nombre de gens ont gagné beaucoup de choses dans ce combat, jusqu’à des bottes [de marque] Eagle, jusqu’à de l’argent… Pour ma part, j’ai gagné beaucoup de regrets. Je parlais justement à Tara [Houska], il y a un instant, nous regardions la fin de cette vidéo… Putain, mec! Ça se termine tellement mal! Et tous ces vétérans qui sont venus, ça n’a absolument pas aidé. Il faut que vous compreniez que, dès le début des camps, parce que notre peuple avait été opprimé pendant si longtemps, nous n’avions pas acquis la connaissance, la compréhension, de ce qu’est le matriarcat. Les idées patriarcales sont tellement incrustées chez les plus âgés, qui ont souffert du système, que c’est en eux, depuis des générations. C’était extrêmement difficile de travailler dans ce camp, parce que ces idées patriarcales, régnaient, étaient suprêmes, même si nous essayions de rester honnêtes avec nous-même. Avec quelques amis, nous sommes restés pendant l’hiver, après que nous ayons arrêté notre camp, nous sommes restés trois mois. Et c’est alors que nous avons vu la corruption de la Tribu Sioux de Standing Rock [le Conseil Tribal], et des gouvernements selon l’IRA [Indian Reorganization Act, une loi sur le statut des Réserves]. Nous avons vu ces vétérans apparaître, et finalement infiltrer certains groupes, et diviser les gens. Plus tard, nous avons découvert que ces groupes qui infiltraient, faisaient entrer de la drogue. Et l’hiver était particulièrement dur, un des plus durs que nous ayons connu, nous avons eu quatre blizzards. Et c’est alors que j’ai appris à être, ça a été une des périodes les plus dures de ma vie. C’est comme cela que j’ai appris à être un être humain, je crois. Parce que nous devions prendre soin les uns des autres, et nous avions à nous méfier les uns des autres. Il ne s’agissait pas de certains types de groupes dans le camp, il s’agissait de qui vivait là. Pendant ce temps, les travaux [du DAPL] étaient supposés être arrêtés. Mais ils creusaient sous le fleuve, tout le temps où ils n’étaient pas supposés travailler. Nous n’étions pas assez nombreux, nous n’avions pas assez de soutien, et nous n’avions pas l’énergie pour entreprendre une quelconque action pour les empêcher de creuser.

Je vous raconte cette histoire parce que je pense que ça peut aider, mais je ne veux pas laisser les autres [intervenants] attendre, en racontant une longue histoire. Je vous raconterai encore celle-ci:

A un moment, en février [2017], alors que Witko, Tufawon et moi rentrions d’un voyage [pour appeler les banques à désinvestir du DAPL], nos amis Yazz et Sage, et quelques autres nous dirent ‘nous avons une idée’. Ils avaient un papier, divisé en trois sections, l’une appelée ‘semaines’, l’autre ‘mois’ et la troisième ‘années’. J’ai demandé ‘qu’est-ce que c’est que ça?’ Et ils me dirent ‘si tu dois faire de la prison, combien de temps est tu prêt à faire, pour arrêter cet oléoduc?’ J’ai regardé et pensé ‘pas de prison du tout’. Nous souffrions de sévère paranoïa, nous étions tout le temps fatigués, il faisait froid, et il y avait beaucoup de choses qui n’ont pas été filmées par la caméra: nous avons combattu les flics à de nombreuses reprises, sur le pont. Et à ce moment-là nous étions arrêtés la plupart du temps, alors j’ai regardé le papier et j’ai dit ‘des années’. Et ce n’est pas pour me vanter, ce n’est pas pour être vu comme un grand guerrier, je ne me considère pas comme un guerrier. Je veux dire, j’aurai préféré des semaines, mais j’ai réfléchi, ‘si je veux faire ça, c’est le moment de me sacrifier’. Et seuls Sage et moi avons choisi les années. Chaque catégorie avait un rôle à jouer dans notre plan. Enfin, il y a eu une réunion de femmes, quelques jours plus tard, certaines de mes tantes étaient venues pour partager leur sagesse avec ces jeunes femmes, et elles ont acquis un certain pouvoir dans les camps, ça faisait plaisir à voir. Quand je dis ‘mes tantes’, il s’agit de Madonna Thunderhawk et de Marbella Philips. Elles étaient dans ce camp de femmes. Nous sommes allés les voir avec nos plans pour leur demander conseil, parce que ces femmes étaient à Wounded Knee en 1973, et depuis, elles ont accompli tellement pour le mouvement. Alors, je leur ai demandé ce qu’elles pensaient. Et elles me dirent ‘vous êtes trop jeunes, nous n’avons pas besoin de vous en prison pour le moment. Il y a déjà suffisamment d’entre nous en prison.’ Et j’étais troublé. Je ne savais pas ce que je devais en penser. Et elles ne voulaient vraiment pas qu’on le fasse. Alors, nous les avons écoutées. Parce que nous les estimons, que nous estimons leurs opinions et leur sagesse. Donc, nous n’avons pas mis notre plan en pratique, nous en avons essayé un autre, qui n’a même pas marché. Les flics avaient fini par le découvrir. C’était fin février, quand ils ont fermé les camps. Et ils avaient creusé en mars. Mais depuis cette décision, j’y pense tous les jours.

Ce qui reste, c’est le tourment et les regrets. Je ne pense pas que nous avons gagné. Je pense que nous avons perdu, nous avons perdu notre combat. Et j’en sais quelque chose, des combats perdus!

Je ne connais pas la réponse, je ne veux pas prétendre connaître les réponses. Je sais ce que j’ai à faire en tant que jeune Autochtone. C’est un honneur d’être ici, avec ces gens, je me sens honoré d’être ici avec vous, et c’est un honneur pour moi de représenter ma Nation. Et je me suis rendu compte, il y a peu de temps, que nous devrons combattre chaque jour de notre vie, c’est quelque chose que je n’attends pas que vous compreniez, je ne pense pas que vous le comprendrez, mais c’est ce que nous devons faire, c’est ce que nous sommes. Et je pense que ça compense mon tourment, parce que je suis fier d’être la personne que je suis, et si fier d’avoir mes ancêtres coulant dans mes veines. Alors, je vais leur rendre honneur de la meilleure façon que je peux, chaque jour de ma vie. Et je continuerai à combattre, par la musique, par l’art, part les tribunaux, sur le front, pour le bien de la communauté, ou avec les jeunes.”

 

 

Le 7 juin, les Protecteurs de l’Eau en tournée en Europe, se sont adressés aux Nations Unies. La veille, ils avaient bloqué le Crédit Suisse, principal investisseur européen dans le Dakota Access Pipeline, avec des activistes européens. La police est intervenue, et Rafael Gonzalez – artiste hip-hop sous le nom de Tufawon, qui devait participer à un concert avec Nataanii Means ce soir-là – a été brutalement expulsé par la police, tout comme des manifestants locaux. Ci-dessous, traduction de deux articles de Censored News, écrit par Brenda Norrell, d’après les récits des Protecteurs.

 

Article par Brenda Norrell
Photos par Waste Win Young, Nataanii Means et Rachel Heaton
Publié sur Censored News
Mardi 6 juin 2017
Traduction Christine Prat

 

GENEVE, Suisse – Des Protecteurs de l’Eau des camps de Standing Rock ont conduit le blocage du Crédit Suisse, un des principaux investisseurs du Dakota Access Pipeline, au cours de leur tournée de 11 pays d’Europe, pour demander de cesser d’investir, de passer à l’énergie propre, et de résister pour l’Eau.

Les quatre membres de l’équipe de Protecteurs en tournée – Waste Win Young, Dakota Lakota de Standing Rock; Rachel Heaton, Muckleshoot; Nataanii Means, Diné Lakota; et Rafael Gonzalez, Dakota – ont conduit la fermeture du Crédit Suisse et se sont rendus ensuite au Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies pour parler.

Beaucoup d’alliés Européens se sont joints à l’opération de fermeture et se sont enchaînés dans la banque.

Nataanii Means a déclaré: “Nous avons bloqué une banque aujourd’hui, le Crédit Suisse, qui est la principale banque européenne pour les investissements dans les oléoducs de Turtle Island (1,4 milliards de dollars). Rafael Gonzalez (Tufawon) a été trainé hors de la banque, comme beaucoup d’autres.

Nous avons exigé qu’ils désinvestissent et se retirent d’investissements qui contribuent directement au génocide perpétuel de notre peuple, au racisme environnemental, et à la destruction de Notre Mère la Terre.”

“Maintenant, nous sommes aux Nations Unies, pour assister et prendre la parole à l’Intervention pour les Droits de l’Homme, en particulier Rachel Heaton et Wasté Win Young”.

Nataanii, fils de Gloria Grant Means, une Diné [Navajo] Omaha de Chinle, dans la Nation Navajo, et du Lakota Russel Means dit: “Mon papa a fait beaucoup de voyages au siège des Nations Unies, pour notre peuple. C’est irréel d’être ici.”

 

 

Voir la vidéo de l’intervention au Crédit Suisse sur Facebook. Les Protecteurs de l’Eau de Standing Rock, Rachel Heaton, Nataanii Means, Waste Win Young et Rafael Gonzalez y ont déclaré demander le désinvestissement, y ont lu une déclaration, disant entre autres que “le Crédit Suisse contribue au génocide de notre peuple!”

Le Crédit Suisse est interpelé pour son financement du Dakota Access Pipeline, qui a dirigé la police militarisée et des groupes anti-terroristes comme TigerSwan, et s’est livré à des violations massives des droits de l’homme pendant les dix mois de résistance pour l’eau dans les camps de Standing Rock. Le Crédit Suisse est désigné pour avoir “financé un désastre à l’échelle planétaire” en investissant dans les carburants fossiles.

D’après une dépêche de Reuters, les Etats-Unis ont menacé de se retirer du forum des Droits de l’Homme des Nations Unies (à cause de ‘préjugés’ contre Israël).

 

Article par Brenda Norrell
Photos par Rachel Heaton et Wasté Win Young
Publié sur Censored News
Le 7 juin 2017
Traduction Christine Prat

 

GENEVE – Des Protecteurs de l’Eau des camps de Standing Rock se sont adressés à l’Assemblée Générale du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, ont participé à des panels, et ont rencontré le Maire de Genève, dans le cadre de leur tournée de 11 pays d’Europe. L’équipe réclame le désinvestissement des carburants fossiles, en particulier du Dakota Access Pipeline, et s’exprime sur la nécessité de l’énergie propre et du respect des droits Autochtones.

Rachel Heaton, Muckleshoot de l’état de Washington, dit: “Aujourd’hui, Rafael et moi avons rencontré le Maire de Genève, tandis que Wasté Win et Nataanii se sont exprimés aux Nations Unies. Nous discutons tous de divers problèmes qui nous touchent en tant qu’Autochtones et construisons des alliances, ici en Europe, pour aider à soutenir les combats chez nous. Je dois dire que ça a été une journée productive jusqu’à maintenant.”

Wasté Win Young, Dakota Lakota de Standing Rock, dit que Nataanii Means, Diné Lakota de Chinle, dans la Réserve Navajo, a fait une intervention de 2 minutes devant l’Assemblée Générale des Nations Unies, sur le droit de se rassembler; et que Rachel Heaton et Rafael Gonzalez, Dakota de Minneapolis avaient rencontré le Maire.

Rachel s’est adressée à l’Assemblée Générale des Nations Unis, puis à un autre panel.

“La police a menacé de démonter le tipi où nous distribuions des tracts pour notre panel de ce matin” dit Wasté Win Young. Elle avait dit aussi la veille: “Le Maire de Genève a approuvé que nous le mettions devant le siège des Nations Unies cette semaine, pendant que nous serons ici. Nous nous adresserons à un panel des Nations Unies durant la session sur les Droits de l’Homme. Rachel doit s’exprimer aujourd’hui et je parlerai jeudi.”

“Alors, les Etats-Unis pourraient se retirer de la commission des droits de l’homme des Nations Unies, sur la base de résolutions des Nations Unies soutenant la Palestine. Oui, Uncle Sam n’accorde pas d’attention aux Autochtones de Turtle Island ni aux violations des droits de l’homme dont il est complice. Pas de problème. Nous continuons à construire.”

L’équipe de Protecteurs de l’Eau avait conduit la fermeture du Crédit Suisse la veille, exigeant le désinvestissement d’Energy Transfer Partners, propriétaires du Dakota Access Pipeline, et l’arrêt de l’implication de la banque dans le génocide perpétuel des grandes compagnies qui violent les droits Autochtones, ignorent les Traités et empoisonnent de façon irresponsable l’eau et la terre.

 

 

La tournée de la délégation des Protecteurs de l’Eau en Europe se poursuit [Voir article précédent]. Après avoir passé plusieurs jours aux Pays-Bas, ils se sont rendus en Allemagne – où ils devaient apporter leur soutien aux gens qui luttent contre les mines de charbon, puis ils devaient se rendre à Genève, où Nataanii Means devait participer à un concert.

 

Les Protecteurs de l’eau aux Pays-Bas

Publié sur Censored News
le 5 juin 2017
Traduction Christine Prat

 

Aux Pays-Bas, les Protecteurs de l’Eau de Standing Rock ont rencontré des parlementaires et visité quatre villes en cinq jours. Puis ils sont allés à Bonn, en Allemagne, au cours de leur tournée dans 11 pays, pour demander de désinvestir dans les carburants fossiles, d’investir dans l’énergie renouvelable, et de lutter pour l’eau.

Waste Win Young, Dakota Lakota, a fait part de leur arrivée à Bonn, en Allemagne, où ils devaient apporter leur soutien aux gens qui résistent contre les mines de charbon.

 

A Groningen, devant un site d’extraction de gaz

 

Rachel Heaton, Muckleshoot, a décrit leur séjour dans un village des Pays-Bas, près de Groningen, où ils ont eu un accueil chaleureux:

“Aujourd’hui nous avons visité un village, dans la ville de Groningen. Les gens là-bas subissent les effets de tremblements de terre d’origine humaine, causés par les sites d’extraction de gaz situés au milieu de leurs terres agricoles. Eux aussi combattent les dommages causés par les grandes compagnies qui placent les intérêts du profit au-dessus de celui des gens, aux dépends de nos vies et de notre terre.

Les gens de cette ville nous ont accueilli avec un merveilleux piquenique… d’un côté il y avait les récoltes des paysans, de l’autre un labyrinthe des tuyaux métalliques s’enfonçant dans le sol et sous les terres de ceux qui vivent ici… le site d’extraction de gaz.

Ils ont partagé un repas avec, puis leurs histoires, et nous ont laissé le temps de raconter les nôtres. Il y a eu tant de belles choses au cours de la journée… mais au milieu de la tristesse juste là, juste derrière chez eux. Ils voulaient tellement en savoir plus sur nos combats et nos luttes de Peuple Autochtone et sur les luttes pour nos terres.

Le voyage a jusqu’à maintenant servi à ouvrir des yeux, plus que nous ne l’aurions imaginé. Les gens que nous avons rencontrés, la terre que nous avons touchée, ceux que nous avons senti reliés à nous, l’eau qui vous a été donnée en cadeau, et le merveilleux groupe que nous formons pour voyager ensemble. Des gens partout dans le monde luttent, et pourtant ils se tournent vers nous, Peuple Autochtone, pour avoir de l’espoir, des conseils, des idées nouvelles, la connexion avec nous, et moi aussi j’en apprend de plus en plus sur la beauté de la lutte.

Je dis des prières pour chaque personne qui a croisé ma route pendant ce voyage, pour ceux qui font déjà partie de mon voyage, et pour ceux à venir. Tant de gens font leur part pour aider Notre Mère la Terre et tant d’eux croient en les peuples Autochtones comme les Protecteurs de l’Eau avec qui je suis et ceux que nous avons rencontrés font la même chose… Je suis si reconnaissante pour cette journée et si reconnaissante pour notre lutte.

A’ho

 

Photos près de Groningen et articles dans les journaux locaux

 

Aujourd’hui, 6 juin, les Protecteurs de l’Eau sont à Genève où ils doivent entre autres participer à un concert.