Indigenous Action
31 juillet 2020
Traduction Christine Prat

Flagstaff, Arizona – Les accusations portées contre trois des onze manifestants visés pour avoir participé à une manifestation en 2018 le ‘Jour des Peuples Autochtones’ à Flagstaff, ont été rejetées.

Ale Becerra, Klee Benally et Sumayyah Dawud, connus comme “les Trois du Jour des Peuples Autochtones » (IPD3), avaient choisi de combattre les accusations et rejeté tout accord de plaider coupable ou autre.

Klee Benally, depuis longtemps défenseur des droits des Autochtones à Flagstaff, déclare: «Je remercie tous ceux qui ont soutenu ceux d’entre nous qui ont été accusés, pour leur solidarité. Vos appels téléphoniques à la Ville et votre engagement constant à lutter pour la justice, pour les terres et les gens, ont eu un effet certain.

Les politiciens de Flagstaff ont déclaré un ‘Jour des Peuples Autochtones’, puis essayé de nous mettre sous les verrous quand nous avons lutté pour la justice. Ils ont utilisé d’énormes ressources pour enquêter et nous poursuivre, mais nous n’avons pas cédé et nous avons eu gain de cause. Aujourd’hui, nos actions sont reconnues comme justes, mais nous ne célébrons pas de victoire. Que la police de Flagstaff et la police dans toute l’île de la Tortue occupée continue d’attaquer et de tuer des gens Noirs ou basanés en toute impunité ne nous donne pas de raison de célébrer. Que les injustices perpétrées par la Ville de Flagstaff – le profit flagrant tiré de la destruction des cultures Autochtones, le profilage racial et la violence extrêmes et la criminalisation de nos frères SDF – continuent en pleine pandémie, ne nous permettent pas de célébrer. Nous célébrons les soulèvements de Black Lives Matter et les actions anticoloniales qui vont au-delà de réformes vides et des gesticulations des politiciens. Nous célébrons et continuons à accélérer le mouvement pour la justice pour la terre et tous les gens.»

Sumayyah Dawud, une militante des droits de l’homme, vivant à Phoenix, Arizona (territoire Akimel O’odham), déclare : « Je suis contente de ce que la Ville de Flagstaff ait pris la bonne décision en rejetant ces accusations. Cependant, elles n’auraient jamais dû être faites, pour commencer, et nous n’aurions jamais dû subir presque deux ans de poursuites. Ce n’est pas une victoire. Je suis consternée de ce que le jour que Flagstaff avait déclaré ‘Jour des Peuples Autochtones’, la police de Flagstaff ait agressivement poursuivi des Autochtones qui défilaient sur leur propre terre, utilisant des méthodes de surveillance extrêmes et qu’elle ait entamé des poursuites sélectives contre ceux qui s’étaient exprimés contre les nombreuses formes d’oppression et de violence anti-Autochtones auxquelles la Ville refuse de cesser de participer, et surtout de reconnaitre. La Ville doit entreprendre une action effective au lieu de s’engager dans une rhétorique insignifiante. Les attaques contre des Autochtones et autres protestataires ne doivent plus jamais se produire.»

Ale Becerra dit: «Il n’y a jamais eu aucun doute pour moi que cette affaire était un acte d’application sélective de la loi, l’unité du Service de Police de Flagstaff qui a décidé de poursuivre s’appelle comme ça. C’est plutôt comique que leurs arguments n’aient pas tenu au tribunal, mais c’est aussi comique pour tout le monde que le tribunal municipal se prononce contre soi-même. La Ville et le tribunal ne font qu’un et sont conçus pour dépouiller la classe ouvrière de Flagstaff d’argent et de liberté. Les accusations sont arrivées à un moment où la Ville de Flagstaff était sous pression à cause de sa collaboration avec l’ICE [Forces de l’Immigration et des Douanes] alors que l’ICE avait un accord avec la prison. J’ai tenu un discours pendant la manifestation, c’est très probablement pourquoi j’ai été visée. Dans ce discours, j’ai été très claire sur ma position de solidarité, en tant que mère immigrée, avec les Autochtones du pays où ma famille est venue quand elle a été déplacée par les effets violents du capitalisme. L’état, et tous ses acteurs, sont la menace contre nos communautés. A tous les niveaux auxquels nous n’avons pas d’autonomie, et où les institutions des suprémacistes blancs ont le pouvoir sur nos corps, ils arment leurs moyens quand ils veulent, comme ils veulent. Que ce soit le Service de Police de Flagstaff, qui criminalise les gens et leur fait craindre même de sortir dans leur propre quartier, ou l’ICE qui s’en prend à ceux qui s’organisent contre leurs raids violents, le FBI installé dans des bâtiments municipaux pour surveiller Mutual Aid [aide aux victimes du virus], les procureurs, les juges, les membres du conseil municipal, les prisons, etc. Ils ont tout un système construit pour nuire à tous ceux qui ne se plient pas à leur agenda.
Nous voyons des mouvements appelant à mettre un terme à leur violence se développer dans tout le pays. Certains diront «ce n’est pas la réalité à Flagstaff.» On les emmerde. Les problèmes qui touchent nos familles et nos proches sont réels, ce sont les vies des gens. Le moment présent exige rien moins que la solidarité active parmi ceux d’entre nous qui travaillent, vivent, aiment et ont toujours résidé dans cette communauté.»

L’avocat de Flagstaff, Lee Phillips, qui représente les trois (ex-)accusés a dit: «Je suis fier d’avoir pu aider à défendre les droits selon le Premier Amendement des manifestants pacifiques qui ont participé à la marche du ‘Jour des Peuples Autochtones’ et je suis heureux que ces trois derniers cas aient finalement été rejetés.»

Le 8 octobre 2018, au moins 40 personnes se sont rassemblées et ont défilé dans le centre de Flagstaff pour dénoncer la déclaration ‘hypocrite’ de la Ville de Flagstaff d’un ‘Jour des Peuples Autochtones’. Le rassemblement avait été tenu pour demander justice pour les Femmes Autochtones Disparues ou Assassinées, les jeunes filles, les Transsexuels et les Frères à Deux-Esprits, pour dénoncer la criminalisation des migrants qui conduit à des déportations et des détentions de masse, la responsabilité de la Ville de Flagstaff pour son rôle dans la profanation des Pics San Francisco, pour mettre un terme à la criminalisation des membres de la communauté SDF, et pour souligner le niveau hors de proportion du profilage racial et des arrestations d’Autochtones. Selon des rapports annuels, la police de Flagstaff arrête en moyenne 6000 personnes par an. Environ la moitié des personnes arrêtées sont des Autochtones, alors qu’ils ne constituent que 11% de la population.

L’attaque politiquement ciblée contre des manifestants était le résultat d’une surveillance par internet et l’emploi d’un opérateur secret par le Service de Police de Flagstaff, ‘l’Unité d’Application Sélective [de la Loi]’ et de la ‘Mission d’Application de l’Equipe de Renseignement sur les Gangs et l’Immigration’ (GIITEM), avant et après les faits.

Près d’une douzaine d’agents du Service de Police de Flagstaff ont utilisé des caméras portatives pour surveiller et documenter la manifestation, puis ont lancé une enquête de plusieurs semaines, utilisant des médias sociaux, comme les mots-dièse et les annonces sur Facebook, ainsi que la liste des invités à la manifestation, et un informateur non-identifié, le tout pour déposer un dossier d’accusations criminelles pour ‘Obstruction d’une Voie de Passage Publique’. Au total, onze personnes ont été initialement accusées le 11 novembre 2018. Sept d’entre elles ont accepté un accord de plaidoyer avec le choix entre 40 heures de service civil ou une amende de 150 dollars.

L’enquête a été conduite par Lance Roberts et Dustin Khuns, de ‘l’Unité d’Application Sélective’ du Service de Police de Flagstaff et ‘l’Analyste de Renseignements Criminels’ Susan Chacon, du GIITEM d’Arizona. L’avocat de Flagstaff Lee Phillips, qui représentait les trois accusés, a déposé une motion contre les poursuites sélectives. La motion affirmait que «les trois individus restant accusés disaient qu’eux-mêmes, et d’autres accusés plus tard, avaient été sélectionnés par la police et les Officiels de la Ville pour être poursuivis, à cause de leur participation connue à de nombreux évènements publiques similaires, visant à attirer l’attention sur divers problèmes de justice sociale.»

Une autre motion a été déposée pour attaquer la décision du Procureur général de la Ville de poursuivre, qui ne révélait pas une série d’emails entre le Service de Police, le Conseil Municipal de Flagstaff et le bureau du Directeur Municipal, tous obtenus par un journaliste de The Progressive, qui a écrit un article sur la surveillance continuelle de ceux qui protestent. Un agent des forces de l’ordre disait dans un des emails: «Pas d’exemption de prison pour eux. Ils ont causé des problèmes et doivent affronter les conséquences!».

Les motions ontété rejetées par la Juge de Flagstaff Amy Criddle.

Les accusés devaient passer au tribunal le 30 juillet 2020. Plus d’un an et demi après que les accusations aient été enregistrées.

Le 9 juillet 2020, une motion demandant de rejeter les accusations a été déposée par le Bureau du Procureur Général de la Ville de Flagstaff, et l’ordre a été signé le 20 juillet 2020.

La défense était prête à citer 23 témoins au procès, parmi lesquels des membres actuels ou précédents du Conseil Municipal de Flagstaff et d’autres cités dans des rapports sur lesquels l’Etat comptait pour l’accusation.

Les organisateurs du rassemblement initial, le Jour des Peuples Autochtones, appelaient à ces actions:

  • Continuer de boycotter la station de ski Arizona Snowbowl et exiger que la Ville de Flagstaff annule son contrat avec la station.
  • Mettre fin au profilage racial et à la collaboration avec l’ICE et s’efforcer d’abolir la police dans nos communautés en établissant des réseaux de soutien communautaires et des options de justice transformatrice/réparatrice.
  • Abroger l’ordonnance anti-camping et toutes les politiques anti-SDF.
  • Dons de sacs de couchage et de vêtements d’hiver pour nos frères SDF à Táala Hooghan Infoshop (1704 N 2nd St).

Voir plus d’infos sur la journée du 8 octobre 2018
Et sur les poursuites.

 

Ce n’est pas la première fois que la police de Flagstaff poursuit des activistes pour des actions menées des semaines auparavant. En 2012, j’avais moi-même assisté à une action au bureau de Flagstaff du Service des Forêts. Il n’y avait eu aucun incident ce jour-là. J’avais filmé l’action et ma vidéo le montrait. Deux mois et demi plus tard, des participants ont été arrêtés et mis en examen sur la base des images – muettes – de la caméra de surveillance du Service des Forêts. J’étais le principal témoin, mais j’étais repartie en France. Le procureur a refusé ma vidéo prétendant qu’elle avait pu être changée. Les autres témoins n’étaient plus là, ou leurs souvenirs pouvaient être mis en doute. Il est évident que ces agissements sont délibérés et ont pour but de se débarrasser des témoignages en faveur des accusés.

Christine Prat

 

Par Indigenous Action Media
Mercredi 14 novembre 2018
Also published on Censored News
Traduction Christine Prat

 

TERRITOIRE OCCUPE DE FLAGSTAFF, AZ – La nuit dernière, la police de Flagstaff a traqué et cité à comparaître, un organisateur pour son rôle supposé dans une manifestation de rue le mois précédent, le jour maintenant reconnu comme ‘Journée des Peuples Autochtones’.

Les flics ont menacé l’organisateur à son travail, disant qu’ils se préparaient à citer d’autres personnes ayant participé à l’action, sur la base d’une surveillance et d’une enquête de près d’un mois.

D’après le rapport de police obtenu ce matin, au moins 13 personnes, des organisateurs Autochtones et des soutiens, seraient accusés du délit d'”Obstruction d’une artère publique” pour leur rôle supposé dans l’action. Le rapport dit que d’autres doivent encore être identifiés par les réseaux sociaux et d’autres formes de surveillance.

“Nous ne nous laisserons pas réduire au silence par ce qui est clairement une attaque politique destinée à décourager de futures actions pour la justice dans nos communautés” déclara Maile Hampton, une des personnes menacées de poursuites. “Le jour où les officiels de la ville célèbrent leur déclaration vide de ‘Journée des Peuples Autochtones’, cette manifestation demandait la justice pour les Femmes Autochtones Disparues ou Assassinées; la fin des expulsions de masse et de la détention d’immigrants; que la ville rende compte de son rôle hypocrite dans la profanation des San Francisco Peaks; et fasse quelque chose au nombre hors de proportions d’arrestations d’Autochtones dans cette ville. Que je doive maintenant faire face à la répression d’état pour avoir demandé la justice n’est pas une surprise, c’est la réalité à laquelle nous sommes confrontés en résistant au génocide culturel.”

“Pour moi, ce n’est pas une coïncidence si ces accusations arrivent à la veille d’une manifestation prévue pour ce vendredi, contre la profanation des San Francisco Peaks” dit Klee Benally, qui est également poursuivi. “Je ne me laisserai pas intimider par la répression d’état, je continuerai à me défendre et à honorer mes ancêtres et les générations futures par ces actions.”

Le rassemblement a en particulier dénoncé le nombre disproportionné d’Autochtones menacés et poursuivis à Flagstaff.

“Cette attaque politique démontre une fois de plus qu’il y a un grave problème d’acharnement policier contre la communauté Autochtone” dit Klee Benally.

D’après le recensement le plus récent, les Autochtones constituent 10% de la population, mais près de la moitié des arrestations annuelles.

 

Les organisateurs du rassemblement avaient déjà appelé à ces actions immédiates:

  • Poursuite du boycott d’Arizona Snowbowl et annulation par la ville de Flagstaff de son contrat avec la station de ski
  • Arrêt du profilage racial et de la collaboration avec l’I.C.E. [police de l’immigration et douanes] et ensuite, abolition de la police dans nos communautés en instaurant des réseaux de soutiens à la communauté, et des options de justice transformatrice et réparatrice
  • Suppression de l’ordonnance contre le camping et de toutes les politiques contre les SDF
  • Dons de sacs de couchage et de vêtements d’hiver pour nos parents SDF à Táala Hooghan Infoshop (1704 N 2nd St).

 

En savoir plus sur l’action du 8 octobre