Earl Tulley et Ofelia Rivas

OFELIA RIVAS, O’ODHAM, ET EARL TULLEY, DINÉ: REFLEXIONS SUR LE CARACTERE SACRE DE LA VIE

Interview du 1er juin 2018
Govinda Dalton, Spirit Resistance Radio
Article de Brenda Norrell
Publié sur Censored News
Le 12 juin 2018
Traduction Christine Prat

DILKON, Nation Navajo, 1er juin 2018 – Ofelia Rivas, Tohono O’odham, et Earl Tulley, Diné, ont parlé des modes de vie culturels et des fondements spirituels de leur peuples, au cours de la Convention de Diné CARE pour l’ouest [de la Nation Navajo]. Ofelia commença par décrire les vastes territoires qui constituaient les terres ancestrales des Tohono O’odham dans ce qui est maintenant l’Arizona, Etats-Unis, et le Sonora, Mexique.

“Nos terres sont très vastes” dit Ofelia, au cours de la conversation avec Earl Tulley, un Diné de Blue Gap, pour Spirit Resistance Radio.

Le territoire ancestral Tohono O’odham s’étendait d’Hermosillo, à des centaines de kilomètres de la frontière actuelle, et au nord jusqu’à Phoenix, à l’est jusqu’à Benson, à la Rivière San Pedro, et jusqu’à la Mer de Cortez, dans le Sonora, au Mexique, dit-elle.

La vie des plantes – médicinales et alimentaires – et la vie animale, nourrissaient les gens. “Nos histoires sur la Création disent que nous étions là dès le début, pour être témoins de la formation de nos Montagnes Sacrées.” “Le commencement de nos Montagnes Sacrées est le commencement de qui nous sommes.”

La culture O’odham est fondée sur les pluies qui apportent de l’eau au désert, dit-elle. “Les chants et les cérémonies les plus sacrés reconnaissent la mer, et le lieu où les nuages se forment et traversent les terres pour apporter la pluie à la saison où on plante, et qui renouvelle notre nourriture, sur les terres.”

Ofelia a été élevée dans la tradition O’odham, dans laquelle les femmes s’asseyaient à part et ne disaient rien. Mais tôt dans sa vie, elle a été reconnue par les Conducteurs de Cérémonies pour son rôle. “Ça commence par la prière” dit-elle du cycle Cérémoniel, et dit comment de jeunes hommes continuent la tradition cérémonielle.

Quand le saguaro [cactus typique du sud-ouest] mûrit, fin juin ou début juillet, c’est le Nouvel An des O’odham.

Pour Ofelia, la résistance est de parler sa langue et de continuer le mode de vie O’odham. Ofelia encourage les autres à, comme elle, survivre aux pensionnats et maintenir la vie suivant les pratiques traditionnelles.

Earl Tulley demanda à Ofelia comment elle saluait d’autres gens qui venaient dans son pays. “Nous sommes toujours là”, dit Earl, à propos du salut Diné Ya’at’eeh. Ofelia répondit que la façon traditionnelle était de faire savoir que vous êtes présent et la personne de la famille présente donne de l’eau et de la nourriture.

Earl dit que les jeunes Diné qui ne parlent pas la langue, utilisent souvent des signes de la main, ou de la tête, pour communiquer et montrer du respect aux Anciens qui ne parlent que Diné. Il dit aussi qu’avant les temps du Traité, les Diné vivaient selon des lois naturelles, en comprenant la lune et le soleil.

Selon Ofelia, les O’odham ne séparent jamais la vie du monde naturel dans des mots comme “environnement”.

“Les femmes avaient leur propre rôle, et étaient très puissante” dit-elle.

Elle dit que pendant des milliers d’années les O’odham récoltaient du sel de la mer. “Il faut connaître les chants, pour récolter cette médecine appelée le sel.” Quand il n’était pas récolté de la manière appropriée, ça causait un déséquilibre. Elle ajouta que quand les gens ne sont pas connectés aux lois naturelles, ça provoque un déséquilibre.

“Nous espérons que la Septième Génération apprendra ce que nous avons appris en grandissant,” dit Ofelia.

Il y a beaucoup de manque de respect parce que les gens ne parlent ni ne comprennent le O’odham. Ofelia dit de son peuple, “Je suis du peuple, des Etoiles qui Apparaissent.” Aujourd’hui, les jeunes gens sont déconnectés, et ils prononcent mal, même à la radio. Elle donna l’exemple de l’expression “maïs qui commence à pousser,” et comment les Anciens disent qu’une légère erreur de prononciation peut être un manque de respect.

Ofelia parla du respect pour les montagnes et la terre, et pour les gens qui y ont été autrefois, quand on marche sur le territoire.

Earl dit qu’avoir grandi, pour un enfant, de façon traditionnelle, est un mode de vie, comme offrir du pollen de maïs au lever du jour. Il parla de la façon dont l’éduction est vue des nos jours, et comment la société actuelle appelle l’imitation “éducation”, qu’on considère souvent comme “devenir instruit.” Mais traditionnellement, l’éducation a une signification différente, qui inclut des accords tacites, comme quel membre de la famille doit parler.

“Celui qui Fait la Terre nous donne nos talents” dit Earl.

A propos de l’éducation moderne, Ofelia raconta que son neveu avait dit que ses diplômes étaient sans valeur, quand la Rivière San Juan a été polluée par une mine d’or, parce qu’il ne pouvait pas empêcher la pollution.

Ofelia se souvient avoir écouté les Anciens et suivi la lune, et le monde naturel. Aujourd’hui, dit Ofelia, les O’odham sont forcés de parler anglais pour pouvoir parler à d’autres. Les Peuples d’Origine du Territoire sont connectés à l’univers, et les Chants et les Prières sont pratiqués chaque année pour la régénération, dit-elle.

Earl raconta comment certains, qui avaient fréquenté des écoles comme Carlisle, avaient appris des techniques, comme par exemple fabriquer des chaussures. Mais quand ils retournaient au Pays Navajo, les gens portaient des mocassins, pas des chaussures. “Ils se sont enfuis à cause de cela,” dit-il, parce que leurs capacités n’avaient plus de place chez eux.

Se souvenant des paroles des Anciens O’odham, Ofelia dit “Quand le vent souffle, nous devons nous courber pour ne pas casser.”

Ofelia dit que le gouvernement tribal était bureaucratique et n’avait pas encouragé les jeunes à partir pour acquérir une éducation et revenir au Pays O’odham avec ce qu’ils avaient appris. Les jeunes O’odham sont partis, ont acquis une éducation et doivent être encouragés à revenir, même ceux qui ont appris à s’occuper d’argent. Elle dit qu’elle avait cessé de travailler au problème de la frontière pendant cinq ans, et attendu que les jeunes reviennent avec des solutions, mais aucun n’est venu avec des solutions contre les exactions de la Patrouille des Frontières, qui se perpétuent actuellement.

Elle expliqua comment travailler avec les jeunes. Ils plantent des graines, les arrosent, puis regardent grandir les plantes et les protègent pendant qu’elles poussent. Le savoir de base peut être utilisé à tous les niveaux, dit-elle. Les jeunes ont besoin de leur éducation.

Earl dit que nous vivions dans un monde où on peut manger des choses hors saison, mais que ce n’est pas pareil. Il dit aussi que le respect ne devait pas être oublié, comme laisser son siège à une personne âgée, ou la laisser passer en premier dans la queue pour la nourriture. Earl dit que la connaissance n’est pas faite pour être gardée pour soi, mais pour être partagée. Il dit aussi que beaucoup de Diné avaient des enfants et des petits-enfants et étaient liés à d’autres peuples.

Ofelia dit que cependant, dans une Cérémonie, c’est inclusif, qu’il n’y a ni couleur ni race. “Ça nous enrichit” dit-elle des O’odham qui sont O’odham et d’autres tribus. Elle dit que si nous savons qui est notre grand-mère, il n’y a pas de déconnexion.

Earl dit que dans l’histoire, il n’y avait pas d’école, ni personne qui pouvait supprimer la langue d’origine. “Nous nous le faisons à nous-même.” Il dit qu’au pensionnat, ils étaient forcés de répéter le Serment d’Allégeance tous les matins. Mais ils disaient le mot Diné signifiant “les moutons arrivent” au lieu du mot “Amérique”.

Earl dit que les prières Diné demandaient la bénédiction de tous ceux A Cinq Doigts, c’est-à-dire tous les gens.

“Nous sommes tous un seul peuple”, dit Ofelia. “Où que nous allions, nous devons nous en souvenir, Nous sommes un seul peuple, et nous avons tous nos façons d’être.”

A propos de la violence domestique, Earl dit “si nous sommes de vrais guerriers, nous devons comprendre notre rôle particulier et que la vie est sacrée.” “C’est alors que Celui qui Fait la Terre sera très fier de nous.”

Ofelia dit que les produits chimiques dans la nourriture et les médicaments devaient être supprimés.

Earl dit que Ceux Qui Ont Deux Esprits avaient des points de vue différents et devaient être respectés. Aujourd’hui, Ceux Qui Ont Deux Esprits ne sont pas complètement acceptés.

“Toute vie est sacrée” dit Ofelia.

©Ofelia Rivas et Censored News. Article traduit avec autorisation. Utilisation commerciale strictement interdite.

La Réserve Tohono O’odham actuelle, avec la frontière tracée sur une carte à la règle. Certains villages ont le même nom des deux côtés, parce qu’ils ont été coupés en deux par la frontière.

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